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M. Hoog, ce qui est dû est dû ! 4-pages SUD sur le dossier des indemnités congés payés

lundi 28 novembre 2011

• L’AFP nous doit beaucoup plus que ce qu’elle consent à nous verser
• La violation du droit était intentionnelle ; il faut rompre avec les méthodes immorales

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Quelle pagaille ! L’arrivée des lettres individuelles annonçant aux personnels sous statut siège la somme qui leur sera versée au titre de la "régularisation" de l’indemnité congés payés a donné lieu à des scènes surréalistes. Dans un même service, des collègues assurant le même travail et ayant la même ancienneté ont constaté que l’un touchait plusieurs milliers d’euros et l’autre une somme inférieure à 100 euros, ou rien du tout. De nombreux autres sont restés les mains vides : l’ensemble des salariés sous statut local, les pigistes, les CDD, les expatriés...

Désinformation de la DRH

Les questions ont fusé, à propos de cette "régularisation", d’autant que les lettres envoyées par la DRH sont incompréhensibles - un comble pour une entreprise censée savoir maîtriser l’information. Aucune explication permettant de comprendre comment les sommes inscrites dans les différentes colonnes ont été calculées !

En attendant la réunion de l’Intersyndicale (mardi 29 novembre à 14h00) et la rencontre de vos représentants avec la Direction (mardi 6 décembre, 15h00), SUD affirme que les calculs de la Direction sont tous faux, car les sommes réellement dues au personnel sont beaucoup plus importantes. Pour reprendre l’image que nous avons déjà utilisée : on nous a volé une moto et on nous rend, au mieux une mobylette, parfois un vélo ou une trottinette, si ce n’est des clopinettes...

D’où vient cette dette ?

Comme le reconnaît la Direction, elle n’a pas respecté la loi concernant le calcul de l’indemnité congés payés. Le Code du travail précise que l’employeur doit faire deux calculs et appliquer celui qui est le plus favorable pour le salarié.
Exemple :
Le journaliste X est passé de RED4 à RED5 au 1er mars 2011. Il prend des vacances au mois d’août 2011.
 Selon la règle du "maintien de salaire", ses jours de congé sont payés en RED5.
 Selon la règle du "dixième", on prend la rémunération totale perçue par lui entre le 1er juin 2010 et le 31 mai 2011 (soit trois mois en RED5, le reste en RED4) et on divise par dix, ensuite on ajuste en fonction du nombre de jours pris.

Étant donné que X a bénéficié d’une augmentation, il est probable que le maintien du salaire soit plus favorable que le dixième. Par contre, nos salaires étant quasiment bloqués depuis plusieurs années, pour la plupart d’entre nous la règle du dixième est plus intéressante financièrement.

Selon la lettre de la DRH, ce calcul n’a pas été effectué "depuis plusieurs années". En fait, on peut chiffrer ce "plusieurs" : cela fait 14 ans que l’AFP ne respecte pas la loi sur ce point (depuis 1997) ! Et elle prétend maintenant "régulariser", sur les cinq dernières années (c’est le délai de prescription en matière de paie).

Erreur ou acte délibéré ?

L’Intersyndicale a en sa possession des documents qui prouvent qu’il ne s’agit pas d’une erreur du service de Paie ou du prestataire de service qui fournit les bulletins de paie, ni d’une décision prise à la légère. Ces sommes ont été volées aux salariés de façon délibérée, et en connaissance de cause.

"Cette décision est très risquée", constate ainsi un Directeur, dans un mémorandum daté du 16 janvier 2002, ajoutant que "le Président a été clair sur ce point. Il veut qu’on applique la Loi". Ce document - comme d’autres - prouve que les plus hautes instances de l’Agence étaient au courant de l’illégalité de leurs pratiques.

A l’époque, le PDG s’appelait Bertrand Eveno. Malgré ce mémorandum, la loi n’a pas été appliquée. On était au moment de la préparation du Contrat d’objectifs et de moyens, dont le thème principal (dicté par Bercy) est celui de la "maîtrise de l’évolution de la masse salariale". D’ailleurs, en novembre 2003, Pierre Louette - énarque et ancien de la Cour des Comptes - a été nommé comme Directeur général, pour surveiller les finances de l’AFP, avec le "succès" que l’on connaît. En avril 2010, lors du départ de Pierre Louette (après avoir été PDG depuis décembre 2005), le ministre de la Culture et de la Communication Frédéric Mitterrand loue son bilan "extrêmement positif", ajoutant qu’"il a su redresser la situation de l’Agence". Oui, mais on voit aujourd’hui que c’est au prix de méthodes de patron voyou, dont ont été victimes les salariés de l’Agence pendant des années.

Comment s’expliquent les grandes différences ?

Il y a essentiellement trois raisons pour les différences entre salariés qui sont apparues lors de la "régularisation" en cours :

 Pour ceux qui ont bénéficié d’augmentations, la règle du dixième est souvent moins favorable que celle du maintien de salaire. Résultat : ils n’ont pas forcément droit à un rappel, au titre du dixième.
 Les salariés travaillant le soir ou de nuit ont bénéficié du fait que la Direction a accepté d’intégrer la prime de nuit dans l’assiette de calcul du dixième.
 Certaines catégories de personnel ont droit a plus de jours de congés que d’autres ; plus il y a des jours à régulariser, plus les sommes sont importantes...

Pourquoi rien n’est réglé

Malgré les affirmations de la Direction, elle n’a pas régularisé la situation. Même si l’on fait abstraction du fait qu’elle ne paie que pour les cinq dernières années, alors que nos droits ont été bafoués depuis 1997. Car le vol continue, sur trois points essentiels, que nous avons déjà évoqués il y a un an :

- 1/ Le 13e mois : la Direction continue de refuser son intégration dans l’assiette de calcul de l’indemnité congés payés, car cela impliquerait une forte révision à la hausse des sommes remboursables. Pourtant, elle sait parfaitement que ce refus est illégal, tant au regard de la loi que des conventions et accords. (Nous avons déjà cité le Protocole d’accord du 17 décembre 1999, signé par le PDG Jean Miot et le syndicat CGT des ouvriers des transmissions : "Pour tenir compte de la rémunération des congés payés et des repos compensateurs à l’Agence, et par analogie aux dispositions prévues pour les autres catégories, tous les éléments de salaire fixe (salaire de base, primes, 13e mois) et variable (prime permanence, heures supplémentaires...) entrent en compte intégralement dans le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés.").

- 2/ Les jours de RTT. Selon nous, ils doivent être indemnisés comme les jours de congés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

- 3/ Le nombre de jours de congés. La Direction refuse d’appliquer les conventions collectives de la Fédération française des agences de presse (FFAP), dont l’AFP est pourtant adhérente. La convention FFAP pour les cadres (dans le sens large, donc y compris les journalistes) précise que " le cadre bénéficie d’un congé d’ancienneté de :
2 jours ouvrables après 5 ans de présence dans l’entreprise
portés à 4 jours ouvrables après 10 ans de présence dans l’entreprise
portés à 6 jours ouvrables après 15 ans de présence dans l’entreprise. "

Ce congé doit s’ajouter aux congés garantis par les autres textes en vigueur, qui ne prévoient pas un congé d’ancienneté.

De nombreux "oubliés"

La Direction affirme que les pigistes et les CDD ne sont pas concernés par cette affaire. Elle n’a pas donné de précisions sur ses intentions concernant les expatriés, les détenteurs d’un CET (compte épargne temps) et les anciens salariés qui ont quitté l’entreprise. Il est fort probable que nous serons en désaccord avec elle, notamment sur les droits des "faux" pigistes qui assurent régulièrement des permanences, et dont les contrats de travail devraient en fait être requalifiés en CDI, comme l’Inspection du travail l’a déjà souligné pour certains d’entre eux.

Les retraités sont particulièrement concernés : leur indemnité de départ est calculée par rapport au dernier salaire, le montant de leur retraite est fixé en fonction des 25 meilleures années. Ces niveaux devront sans doute être révisés à la hausse. Plusieurs retraités de l’AFP saisiront très prochainement les Prud’hommes, via l’avocat de SUD, pour tenter d’obtenir réparation.

Les organismes sociaux volés ?

La décision immorale qui consistait à violer la loi sur l’indemnisation congés payés a sans doute des conséquences fatales au niveau collectif.

Le budget du Comité d’entreprise est calculé en fonction de la masse salariale globale. Comme celle-ci a été fortement minorée, il est très probable que le CE ait été lésé.

Plus grave encore : d’importantes sommes ont ainsi échappé aux organismes sociaux (Sécurité sociale, assurance chômage, caisses de retraite...) et au fisc, ce qui pourrait d’ailleurs entraîner des conséquences graves pour l’AFP et ses responsables.

La Direction devra s’expliquer sur ces points.

"Solder le passé !"

Face à l’étendue du scandale, l’actuel PDG Emmanuel Hoog doit faire un choix : ou bien régulariser réellement et totalement, en rompant avec les méthodes illégales et immorales du passé, ou bien se voir confronté à une vague massive de procédures judicaires.

Interpellé lors du Comité d’entreprise du 24 novembre 2011, M. Hoog a plaidé la bonne foi, ajoutant qu’il était obligé de "solder le passé", donc d’essayer de corriger les méfaits de ses prédécesseurs. Nous lui avons répliqué que nous avions réclamé depuis longtemps le "respect du droit" et une "moralisation des relations sociales" à l’AFP, ce qui ne concerne pas seulement le dossier des congés, mais aussi l’emploi dissimulé, la triche sur la paie des expatriés, la gestion des carrières "à la tête du client", l’absurde aménagement des locaux place de la Bourse et rue Vivienne, le non-respect du principe d’égalité entre salariés sous statut siège et sous statuts locaux...

Les prochains jours seront décisifs. Nous ne demandons pas de privilèges, juste le respect de nos droits !

Paris, le lundi 28 novembre 2011
SUD-AFP (SUD Culture & Médias Solidaires)

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Rappel des principaux textes SUD sur ce dossier

Novembre 2010 :
L’AFP doit à ses salariés des milliers d’euros

Mars 2011 :
M. Hoog déclare : "Ce qui est dû est dû" !
 SUD répond : "On ne manquera pas de lui rappeler cet engagement le jour de paie. Espérons qu’il l’a pris en bonne connaissance des conventions collectives et de l’assiette de calcul des indemnités congés payés qu’il faudra appliquer lorsque l’AFP passera à la régularisation de cette dette contractée vis-à-vis de son personnel..."
http://www.sud-afp.org/spip.php?article89

Juillet 2011 :
Congés payés : la direction prête à nous rembourser - mais de combien ?
CE du 13 juillet 2011

Novembre 2011 :
Mise en demeure : M. Hoog, "SUD vous met en demeure de rompre avec les pratiques du passé et d’adopter une attitude digne de notre Maison."
http://www.sud-afp.org/spip.php?article118