Le rapport annuel de la HALDE (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité), publié la semaine dernière, épingle l’AFP. Citation (page 42) :
« Délibération n° 2008-69 du 7 avril 2008. La HALDE a été saisie par l’intermédiaire du syndicat SUD d’une réclamation d’un journaliste de l’Agence France-Presse, l’AFP, au sujet des conditions de désignation des représentants du personnel au conseil d’administration. Le statut de l’agence, adopté en 1957, ne reconnaissait le droit de vote qu’aux ressortissants français.
L’AFP a transmis une note interne qui confirmait sa volonté d’ouvrir le droit de vote et l’éligibilité aux salariés étrangers, mais a omis de mentionner la tenue de nouvelles élections pour lesquelles était précisé que "sont électeurs, dans le collège des journalistes comme dans celui des autres catégories, les ressortissants des trente pays de l’Espace économique européen".
Ainsi, une grande partie des journalistes professionnels étrangers restaient exclus de ces élections.
Aucune raison objective ne justifiait que les journalistes étrangers fussent exclus du droit de vote et de l’éligibilité au conseil d’administration de l’AFP. Les dispositions relatives à la nationalité figurant dans la loi et le décret fixant le statut de l’AFP, étaient donc contraires au principe d’égalité et de non-discrimination.
La HALDE a recommandé une modification de ces textes. »
Aucune dépêche AFP ne fait mention de ces constatations de la HALDE. Pourquoi ?
Est-ce parce que la délibération de la HALDE, ainsi que la publication du rapport annuel, viennent contrarier la stratégie de communication de notre PDG ? Pierre Louette, qui s’emploie à se présenter comme l’homme qui fait bouger les choses et qui modernise l’AFP, alors que ses détracteurs seraient des passéistes et les tenants du statu quo ?
Le rapport de la HALDE réitère le reproche d’avoir « omis de mentionner la tenue de nouvelles élections », au moment où la HALDE enquêtait sur une affaire de discrimination concernant les droits de plus d’un millier de salariés de l’AFP. Le PDG a toujours balayé ce reproche, c’est son droit. Mais est-ce faire preuve d’indépendance rédactionnelle que de faire le « black-out » sur ce contentieux ?
Pierre Louette a été informé de la saisine de la HALDE dès septembre 2007. Depuis, il a toujours temporisé et essayé d’instrumentaliser cette affaire afin de « vendre » son projet de réforme du statut (transformation de l’AFP en société anonyme).
S’appuyant sur la délibération de la HALDE, SUD a saisi en avril 2008 le Tribunal d’instance (TI) du 2e arrondissement de Paris pour demander l’annulation de l’élection des représentants du personnel au CA et pour obtenir l’organisation d’un nouveau scrutin permettant à l’ensemble des salariés (européens ou non) de s’exprimer. Les élus au Comité d’entreprise ont souhaité que SUD accepte une médiation judiciaire pour tenter de régler ce contentieux, ce que nous avons fait. Cependant, la médiation entre SUD et l’AFP a échoué ; l’affaire revient devant le TI le 3 septembre 2009, deux ans après la saisine de la HALDE.
Ce dossier montre qu’en matière de droits sociaux, le PDG est rarement pressé de régler les problèmes. Il est au mieux l’homme du statu quo, au pire celui de la régression.
Pour en finir avec les discriminations « il faut passer à l’acte, ne pas se contenter de bonnes paroles », a affirmé la semaine dernière Louis Schweitzer, le président de la HALDE. Voilà une conclusion à laquelle SUD s’associe pleinement.
Paris, le 18 mai 2009
SUD-AFP