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L’AFP, une entreprise vraiment bienveillante ?

lundi 28 octobre 2024

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La direction de l’AFP aime se présenter comme bienveillante à l’égard du personnel et certains exemples tirés du passé récent peuvent le faire penser. Il y a eu notamment l’évacuation de nos photographes syriens, à qui l’agence a offert un nouveau départ en France, ou encore l’aide apportée à nos collègues afghans qui devaient fuir le retour des talibans. Des actions qui traduisent sans conteste les valeurs défendues par notre entreprise.

Malheureusement, il y a également des moments où l’on se demande si la direction de l’AFP n’est pas la Reine-sorcière plutôt que Blanche-Neige. C’est notamment le cas lors du licenciement, en 2023, du représentant syndical des journalistes locaux de notre bureau de Lisbonne. Une cour d’appel vient de juger ce licenciement illégal. L’AFP avait justifié à l’époque cette décision par le fait qu’il n’avait pas respecté la clause d’exclusivité de son contrat de travail, une restriction courante que les employeurs imposent à leur personnel dans de nombreux secteurs.

Sauf que les collaborations extérieures sont fréquentes dans les médias et que les conventions collectives nationales des journalistes, en France mais aussi au Portugal, rendent possible ce type de piges. À l’AFP, il est évidemment interdit de travailler pour un concurrent direct, mais pour les autres médias, l’usage est d’avertir la direction de nos collaborations extérieures, pour lui donner la possibilité de s’y opposer si certaines lui semblent problématiques.

- Un prétexte pour licencier -

Dans le cas de ce journaliste franco-portugais recruté à temps partiel en droit local, l’AFP savait dès le départ qu’il travaillait pour des médias français, qui se trouvaient être aussi des clients de l’agence, mais pas des concurrents. Il paraissait donc évident que le reproche ultérieur d’entretenir des collaborations extérieures ne servait en fait que de prétexte à l’AFP pour se débarrasser d’un représentant syndical, et SUD avait prévenu la direction générale de l’époque qu’elle fonçait droit dans le mur. Cela soulevait aussi la question fondamentale de savoir jusqu’où un employeur peut aller pour empêcher un salarié à temps partiel de travailler à l’extérieur. Et la cour d’appel de Lisbonne a tranché que l’AFP avait été trop loin.

L’agence est maintenant confrontée à une décision importante : accepter le jugement ou se pourvoir en cassation. Pour SUD, il serait malveillant que l’AFP conteste ce jugement pour essayer de justifier le fait qu’elle peut forcer ses journalistes à temps partiel à aller retourner des steaks plutôt que de les laisser prendre des photos ou bien mener des interviews les jours où ils ne travaillent pas pour elle. Sans compter qu’un recours pourrait faire traîner le dénouement pendant des mois ou des années, ce qui serait un fardeau financier et psychologique supplémentaire pour ce jeune journaliste en attente de sa réintégration.

Cette affaire montre aussi très bien le sort parfois funeste qui est réservé aux salariés de droit local de notre réseau, quand ils tentent de défendre leurs droits face à une direction brutale. Cette brutalité, nous sommes également en train de la voir à l’œuvre dans le projet de fermeture du bureau régional de Nicosie.

La semaine dernière, les élus du personnel du Siège ont temporairement bloqué ce plan présenté en CSE. Mais les syndicats français ne peuvent le faire qu’une seule fois, et la direction reviendra sans doute à la charge en novembre. SUD estime pourtant que la direction n’a pas de raisons financières et rédactionnelles convaincantes pour fermer rapidement et complètement ce bureau où travaillent plus de 70 salariés.

- Des salariés poussés vers la porte -

Pour SUD, ce projet n’a de sens que si la direction cherche en réalité à se débarrasser d’une grande partie de ses salariés de droit local en les obligeant à s’installer à Paris ou à Dubaï, où beaucoup n’auront pas les moyens de faire venir tous les proches qui étaient venus les rejoindre à Nicosie. Et pour une poignée d’entre eux, il est même question d’aller travailler à Beyrouth.

La direction refuse aussi fermement de révéler quelles seront les contreparties matérielles qu’elle entend proposer au personnel de Nicosie, au motif que cela ne regarde pas les syndicats français, ce qui est, selon nous, inadmissible. Mais il est déjà clair que beaucoup devront choisir entre perdre leur emploi ou accepter une baisse de leur niveau de vie, ou encore d’aller vivre dans un pays en guerre. L’AFP, une entreprise bienveillante… en êtes-vous sûrs ?

Paris, le 25 octobre 2024
SUD-AFP (Solidaires-Unitaires-Démocratiques)