Lors de la deuxième réunion des négociations annuelles sur les salaires (NAO), le 16 octobre, la direction de l’AFP a annoncé aux syndicats que l’année 2025 serait sous le signe de la « rigueur ». Après avoir listé une série de mauvaises nouvelles commerciales, elle a expliqué que l’ensemble de l’agence devrait consentir à fournir des « efforts ». Et bien entendu, aucune augmentation générale des salaires n’est envisagée. La direction ajoute alors avec culot que « l’austérité » n’est pas encore de mise ! Et pourtant, c’est bien d’austérité qu’il s’agit pour les salariés.
Les dernières prévisions de la Banque de France annoncent en effet une inflation à +2,5% en 2024, et sans augmentation équivalente des salaires – principale revendication de SUD pour cette NAO - un nouveau grignotage de notre pouvoir d’achat est inévitable. Une triste perspective quand on sait qu’après des années de vaches maigres, la direction a consenti lors de la NAO 2023 à nous accorder que 2% d’augmentation générale (au 1er mai 2024) au terme d’une période inflationniste historique.
Début 2024, la direction se réjouissait pourtant – à juste titre - du renouvellement par l’État de notre Mission d’intérêt général (MIG) par le biais d’un nouveau Contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2024-2028. Ce plan prévoit une augmentation de notre subvention annuelle d’environ 7 millions d’euros, une hausse certes conséquente mais qui s’avère - comme SUD le craignait à l’époque - bien insuffisante. Force est de constater que les finances de l’Agence ne tiendront pas pour les cinq années du COM, surtout que l’actuelle direction a fait le choix de rembourser plus rapidement ses dettes auprès des banques.
- Des salariés sacrifiés -
Résultat : seul le sacrifice financier des salariés, pour contenir la masse salariale, permettra à l’AFP de se maintenir à flot. Le pouvoir d’achat des salariés va lui continuer à diminuer, comme un pneu crevé. Et comme un automobiliste peu attentif, certains salariés de l’AFP ne semblent pas toujours en prendre conscience, en raison notamment des évolutions de carrière automatiques dues à l’ancienneté. Mais l’issue est inévitable. Plus tard, ils seront à plat !
En attendant, pour donner un os à ronger aux salariés, la direction a expliqué en NAO qu’elle maintiendrait la campagne annuelle de primes exceptionnelles et promotions 2024 (mesures appliquées en 2025)… Et elle ne se cache pas pour dire que c’est de toute façon la méthode qu’elle préfère : accorder des mesures individuelles aux “méritants” qu’elle a choisis. Sauf que, non seulement le nombre de bénéficiaires est très limité par rapport au nombre total de salariés, mais l’expérience montre aussi que la direction récompense autant la loyauté que le mérite. Nous la soupçonnons également de favoriser les encadrants pour compenser le fait que l’accord d’entreprise de 2017 (non signé par SUD) ne rémunère pas suffisamment les postes à responsabilité.
Le manque de transparence dans l’octroi de ces primes et promotions est flagrant et SUD a déjà constaté une inégalité de traitement entre les catégories professionnelles en ce qui concerne les primes exceptionnelles.
Il est donc inacceptable d’avoir seulement des mesures individuelles et aucune mesure collective afin de compenser la perte de pouvoir d’achat de l’ensemble des salariés, en particulier pour ceux d’entre nous qui se trouvent au bas de l’échelle des salaires et qui ressentent plus durement la hausse des prix.
SUD estime que laisser ramer les plus précaires dans l’inflation n’est pas à la hauteur de la réputation de l’AFP. L’idée, envisagée par la direction, de supprimer les échelons de nos grilles AFP qui sont tombés depuis 2017 sous le SMIC n’est pas une vraie solution au manque de dynamisme salarial à l’agence.
- Plus rien au bout de 20 ans -
La direction a également rejeté la proposition de SUD d’ajouter des niveaux paliers supplémentaires à 25, 30 et 35 ans d’ancienneté d’entreprise. Lorsque nous avons proposé cette mesure pour la première fois il y a quelques années, certains de nos collègues syndicaux nous ont traités d’irréalistes. Nous sommes heureux que tous les syndicats aient fait des propositions similaires cette année. Il semble qu’il y ait désormais un consensus sur la nécessité de tels mécanismes pour remédier au plafonnement des carrières, en général au bout de 20 ans, qui découragent nombre de salariés et génèrent de la frustration.
Sur le volet « temps de travail » de la NAO, la direction n’a pas accepté non plus notre revendication de création d’un congé menstruel. Elle propose un recours supplémentaire au télétravail pour prendre en compte les effets médicaux pour les salariées concernées dans la limite de trois jours par mois. Ce n’est pas ce que SUD réclamait. Près de 10% des femmes sont atteintes d’endométriose et elles sont encore plus nombreuses à souffrir de règles douloureuses. Ces douleurs sont souvent invalidantes. Que ce soit au bureau ou chez soi, c’est la même incapacité à se concentrer et à se mouvoir. Cette suggestion de télétravail supplémentaire ne tient pas compte des réalités.
La proposition de la direction d’améliorer les rémunérations de certains encadrants lésés par l’accord d’entreprise de 2017 est légitime : les responsabilités supplémentaires devraient être accompagnées d’une rémunération supplémentaire. SUD apprécie que la direction ait accepté notre demande d’accorder une indemnité de fonction aux journalistes vidéo de province, à l’instar de leurs collègues photo, pour la coordination éditoriale dans leurs régions.
Malheureusement, la direction a rejeté notre demande de doubler la prime de dimanche de 10 euros à 20 euros, et d’étendre cette prime aux samedis travaillés. Travailler le week-end est pénalisant car elle vous prive passer du temps avec votre famille ou vos amis. Une prime pour compenser cet inconvénient est légitime.
La troisième réunion NAO est prévue le 5 novembre. C’est traditionnellement là où les vraies négociations commencent. La direction va-t-elle enfin admettre que le plan financier quinquennal de l’AFP, qui vient à peine d’être lancé, ne prévoit déjà plus rien pour les salariés et qu’elle doit y remédier ? Car 2029 est bien trop loin pour attendre une hypothétique augmentation ! Les salariés ne sauraient le supporter.
Paris, le 1 novembre 2024
SUD-AFP (Solidaires-Unitaires-Démocratiques)