A l’issue de la poursuite du CSE du 26 septembre 2025 avec les organisations syndicales le mardi 7 octobre, la direction de l’AFP, dont le PDG a brillé par son absence, a décidé de poursuivre à marche forcée son projet d’économies malgré les alertes sérieuses de toutes les organisations syndicales.
Alors que la direction cherche à faire partir environ 70 « retraitables » sans les remplacer, les différents avocats sollicités par les syndicats, ainsi que l’inspectrice du travail, ont rendu un avis sans appel : ce projet présente un risque juridique important en apparaissant comme un plan social qui n’en porterait pas le nom. Lors de la réunion de mardi, la direction, qui n’avait visiblement pas étudié l’aspect légal de son plan, a souhaité une suspension de séance afin de réaliser sa propre consultation juridique : mieux vaut tard que jamais ! Et de revenir vers nous la fleur au fusil 30 minutes plus tard en affirmant que pour eux, pas de problème !
Dans ce contexte et après avoir longuement détaillé la liste des insuffisances, contradictions et problématiques concrètes posées par les conditions de participation au plan, les organisations syndicales ont refusé de rendre un avis qui, même négatif, aurait permis à l’AFP de poursuivre dans cette voie que nous jugeons sans issue. La direction, qui semble ne plus être à un passage en force près (poste unique, réorganisations, fermeture de Nicosie, IA à tout va), a décidé de considérer que cette absence d’avis équivalait à un vote contre et d’embrayer.
Pourquoi insister malgré les risques soulevés par les organisations syndicales ? Soit la direction fait le pari que son analyse juridique est plus pertinente que celles que nous avons sollicitées, soit elle fait le pari que les retraitables « volontaires » qui partiront n’attaqueront pas ensuite l’Agence pour obtenir plus d’argent. Dans les deux cas, si diriger, c’est effectivement faire des paris sur l’avenir, selon notre PDG, celui-ci nous semble extrêmement hasardeux. La direction n’a-t-elle pas retenu les leçons du passé, quand les arrangements “à l’amiable” ont terminé devant les tribunaux ? Alors que de nombreux salariés n’ont toujours pas obtenu de solution quant à leurs trimestres non cotisés, et menacent d’une action en justice, l’AFP peut-elle vraiment se permettre d’ouvrir un nouveau front avec un plan bricolé à la va-vite ? Sans parler des conséquences des non-remplacements que la direction semble juger secondaires pour le moment.
Entre le marteau et l’enclume
Outre le dialogue social depuis longtemps sous-estimé par la direction, le pire reste la responsabilisation des organisations syndicales qui, mises face au fait accompli, se retrouvent entre le marteau et l’enclume. Accepter le plan tel quel sans le moindre engagement de la direction, ou retarder l’information aux salariés ? Accepter un plan illégal pour permettre à quelques-uns de programmer leur départ au plus tôt, ou bien requalifier le plan d’après la vérité juridique et se voir accusé de réclamer un plan social ? Depuis plusieurs mois, SUD alerte sur les faux semblants de ce plan. Pour finir, notre intuition était la bonne : à partir du seuil légal de 10 suppressions de postes (et pas uniquement à la suite de licenciements) sur une période de 30 jours, un employeur ne peut pas échapper aux contraintes liées à un plan social.
Et parce que nous entendons déjà la petite musique qui risque de se faire entendre, rappelons quelques évidences.
Non, SUD n’est pas favorable à un plan social. Mais SUD n’est pas favorable non plus à des suppressions de postes sans réglementation qui vont désorganiser l’Agence et l’affaiblir.
SUD n’évacue pas non plus, comme l’a fait la direction, l’hypothèse d’aller chercher un soutien public dans un moment de turbulences pour l’AFP et alors que l’Etat ne compense pas à 100%, depuis des années, le coût de notre mission d’intérêt général (MIG).
Et SUD ne considère pas, comme la direction citée dans Le Monde, que demander de l’aide à l’Etat fragiliserait notre indépendance. Si l’indépendance de l’AFP se mesurait à l’aune du soutien public, alors regardons les choses en face : avec plus de 40% de notre budget provenant de l’Etat français (environ 142 millions d’euros en cumulant la MIG et ses abonnements), nous ne sommes pas indépendants, financièrement tout du moins.
Si ce guichet départ pour les retraitables peut, selon certains, apparaître comme un moindre mal aujourd’hui, il nous semble particulièrement dangereux pour l’avenir. Surtout parce que le PDG qui prend une décision aujourd’hui n’est souvent pas celui qui en assumera les conséquences ensuite. Le PDG Fries devrait se souvenir qu’il a dû solder – via des augmentations de salaire et le versement de plusieurs millions d’euros d’arriérés – le procès perdu du SPQN, lancé par des syndicats (dont SUD) après la décision de l’ex-PDG Emmanuel Hoog de plus respecter l’accord sur les hausses salariales liées aux grilles du SPQN (presse quotidienne nationale).
Un plan bancal, anxiogène et surtout dangereux
Et en tant qu’organisation syndicale responsable, SUD ne peut pas fermer les yeux sur le risque juridique de l’actuel plan d’incitation au départ à la retraite présenté le 26 septembre et le 7 octobre aux élu.e.s du CSE, par une direction qui espérait sans doute que personne ne s’en rende compte, avant de faire ensuite comme s’il n’existait pas.
SUD juge ce plan bancal, anxiogène et surtout dangereux pour l’Agence. Sans nier les difficultés commerciales à venir en 2026, il faut aussi rappeler que l’AFP n’est pas au bord de la banqueroute et que les caisses de l’agence ne sont pas vides. Pas du tout même, à écouter le cabinet Sextant, qui assure l’expertise financière pour le CSE. Donc pas la peine de suivre ceux qui s’inquiètent de savoir si le 13e mois sera bien versé en décembre aux salariés du Siège.
SUD appelle les salarié.e.s à se ressaisir et à se mobiliser pour défendre leurs emplois et leur qualité de vie au travail. Ils doivent refuser la soi-disant fatalité d’une crise financière qui nous engloutirait bientôt. Il faut refuser les suppressions massives de postes et défendre la pertinence de notre organisation afin de poursuivre correctement notre mission d’intérêt général.
Paris, le 9 octobre 2025
SUD-AFP (Solidaires-Unitaires-Démocratiques)
SUD-AFP