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Après le succès contre le projet Hoog-Legendre : nous avons gagné une bataille importante,mais d’autres attaques suivront, à coup sur

mardi 14 juin 2011

La forte mobilisation contre le projet Hoog-Legendre a porté ses fruits. La proposition de loi prévoyant la mise sous tutelle politique de l’AFP et sa fragilisation financière n’a pas été inscrite à l’ordre du jour de la session ordinaire du Sénat qui se termine le 30 juin.
 
En lançant deux grèves de 24 h en deux semaines, nous avons frappé fort et obtenu un répit très précieux.
 
Peut-être même un enterrement définitif. Car ce texte bâclé manque de soutien dans les rangs mêmes des sénateurs UMP, et la droite risque de perdre la majorité lors des sénatoriales de septembre. Vu la levée de boucliers, tant à l’agence que dans les rangs des parlementaires de l’opposition et du centre, on peut se demander si le gouvernement prendra le risque de faire examiner ce texte avant la présidentielle de 2012.
 
Le PDG, lui, ne s’avoue pas vaincu. M. Hoog a reporté à la fin du mois le Comité d’entreprise initialement prévu le 15 juin. Sa première réaction - une note de 119 mots (soit trois paragraphes) datée du 9 juin - s’accroche à l’éventualité d’un examen de son projet par le Sénat à l’automne.
 
Quel que soit le sort final du projet Hoog-Legendre, une chose est évidente :
 
Il y aura d’autres offensives contre le Statut !
 
La prétendue « obsolescence » du Statut de l’AFP est devenue le leitmotiv de la présidence de M. Hoog, comme de celle de son prédécesseur Pierre Louette. Cet acharnement contre le texte fondateur de l’Agence France-Presse a quelque chose de choquant. Car, si l’objectif reste le même (casser le Statut de 1957), les arguments et les solutions envisagées changent :
 

  • Mars 2009 - Rapport de Pierre Louette : « Ce statut n’est plus adapté aux nécessités et aux défis du moment, au point de devenir un handicap » pour l’Agence et « un frein à son développement ». (…) « Le statut de l’Agence lui interdit de recourir aux financements de marché pour réaliser des opérations de haut de bilan. Sans capitaux propres pérennes, l’Agence ne peut financer son développement ».
  • Avril 2010 - Le Rapport Pigeat « considère indispensable de conforter » le Statut de 1957, mais il propose de l’ « enrichir ». En fait, il s’agirait de transformer l’AFP - avec son Statut - en coquille vide et de transférer tout le personnel dans une filiale de services, AFP-SE : « La mission de AFP-SE est, par délégation de l’AFP, d’assurer sous la marque AFP toutes les activités de l’Agence dans le secteur concurrentiel, ainsi que le ou les contrats de prestations de services que l’Agence peut avoir conclu avec les pouvoirs publics pour des missions d’intérêt général ».
  • Mai/Juin 2010 - Le nouveau PDG Emmanuel Hoog : « Je ne suis pas convaincu qu’il existe un lien entre le développement économique et le statut de l’Agence » (CE du 20 mai 2010) et « la question de la révision des statuts, pour moi, n’est pas un sujet à l’ordre du jour » (CE du 17 juin 2010). Cf. l’argumentaire de notre collègue Samir Douaihy,
  • Mars 2011 - M. Hoog milite désormais pour changer la « gouvernance » de l’AFP. Dans un texte remis au Conseil constitutionnel, un avocat de l’AFP, mandaté par le PDG, affirme que l’article 7 du Statut (composition du CA de l’AFP) est dans sa globalité « inconstitutionnel ». Il va même jusqu’à prétendre que cette disposition du Statut serait « attentatoire au principe d’indépendance des médias » inscrit dans la Constitution.
  • Mai 2011 - Le PDG justifie la proposition de loi Legendre en affirmant que « le statu quo est impossible » et que « la situation actuelle n’est plus tenable » parce qu’elle « consiste à affirmer - contre toute évidence - que la centaine de millions d’euros versée chaque année par l’État relève d’une relation strictement commerciale ». M. Hoog défend désormais un texte qui modifierait profondément l’ensemble du Statut de 1957. (Cf. la documentation SUD-AFP sur cette proposition de loi
     

Quand on veut tuer son chien, on l’accuse d’avoir la rage

 
En fait, le Statut de l’AFP gêne triplement, il suffit de regarder autour de nous :
 

  • 1/ Dans une belle unanimité, les gouvernements des principaux pays occidentaux réduisent de façon drastique les dépenses de l’Etat, les services publics et la couverture sociale des citoyens. Le désengagement financier de l’Etat vis-à-vis de l’AFP s’inscrit dans cette logique. Le gouvernement a fait d’énormes pressions sur l’AFP lors de la négociation du deuxième COM (Contrat d’objectifs et de moyens), refusant en 2008 le traditionnel ajustement de la convention Etat-AFP, ce qui se traduit depuis par une perte de revenu de plus de 1,5 million d’euros par an pour l’AFP.
  • Le projet Hoog-Legendre prépare le terrain à une réduction drastique du financement public de l’AFP, en faisant la différence entre Missions d’intérêt général (compensées par des sommes « n’excédant pas le montant du coût net d’exécution desdites obligations ») et activités commerciales soumises à la libre concurrence.
  • Pour arriver à cette fin, ils veulent casser le Statut de 1957, car celui-ci exprime la volonté politique du législateur de donner à la France une agence de presse mondiale, qui n’appartient à personne si ce n’est qu’au peuple français, et dont l’activité dans son ensemble est définie comme une mission d’intérêt général.
  • 2/ Les grands organismes internationaux (Banque mondiale, OCDE, Commission européenne...) tentent d’imposer aux peuples la libre concurrence non faussée dans tous les domaines de l’économie. D’où la privatisation des services publics et l’intrusion d’intérêts privés dans la Protection sociale, la Santé, l’Education... La libéralisation des services n’est pas achevée, mais la marchandisation de l’Information avance : il s’agit de transformer l’usager en client, et de détourner le droit à l’information en consommation de produits susceptibles d’ouvrir des marchés juteux aux acteurs de l’économie numérique.
  • Pour parfaire cet objectif, ils veulent casser le Statut de 1957, car il sort l’agence de l’emprise des grands groupes financiers, ce qui constitue sa principale spécificité par rapport aux autres agences de presse mondiales.
  • 3/ Parallèlement à cette libéralisation économique, le gouvernement sarkozyste tente de renforcer le contrôle politique sur les médias d’information, s’appuyant à la fois sur des mesures législatives (réforme de l’audiovisuel public, Hadopi, régulation des radios indépendantes, tentative de réforme du Statut de l’AFP…) et sur les amitiés du président parmi les dirigeants des quelques grands groupes qui contrôlent désormais les médias privés.
  • Pour compléter cette prise en mains à l’approche de l’élection présidentielle 2012, ils veulent casser le Statut de 1957, car il garantit une indépendance structurelle de l’Agence vis-à-vis du gouvernement. 

Pas de fatalisme ! Résister est possible !

 
La victoire en 2010 contre le Plan Louette, tout comme le succès de la mobilisation contre le projet Hoog-Legendre, montre que l’indifférence et la résignation ne sont pas de mise. Ils veulent nous faire croire que leurs réformes sont inévitables ? Nous prouvons le contraire !
 
Même sans vote, notre résistance au projet Hoog-Legendre aurait été légitime. Le droit de grève est un droit constitutionnel, qui peut même être exercé par une minorité. Manque de bol pour le PDG et ses relais, les deux grèves ont été légitimées par les votes en Assemblé générale et dans les bureaux de province.
 
Ensemble, nous avons été efficaces. Et sans nos actions, la casse de cet acquis démocratique qu’est le Statut de l’AFP aurait avancé à grands pas.
 
Profitons de ce succès, pour élargir la base de notre résistance. Saisissons-nous des prochaines échéances électorales à l’AFP pour les transformer en votes de défiance contre le PDG et ses soutiens. Lors des élections au Comité d’entreprise et des délégués du personnel (28 juin-29 juillet) et des représentants du personnel au CA (29 juin-13 juillet), votons en faveur des candidats qui défendent de façon combative les intérêts de l’Agence et de ses salariés !
 
Paris, le 14 juin 2011
SUD-AFP (SUD Culture & Médias Solidaires)