Et maintenant ?
Deux ans et demi après avoir présenté son scénario d’économies , et plus d’un an après avoir dénoncé la quasi-totalité des accords sociaux, la direction de l’AFP a enfin précisé sa position sur ce qui constitue un des points essentiels de son projet : la diminution des jours de repos et l’augmentation des horaires. La dernière réunion de négociation sur le Grand accord (6 octobre) a permis de clarifier les choses. Voici ce que SUD en retient.
Haro sur les conditions de travail
La direction avait promis une simplification et « plus d’équité ». Elle demande désormais à tous de nouveaux sacrifices et « propose » de fixer trois durées de travail hebdomadaires « de référence » différentes : 35h pour les journalistes en travail posté, 37h pour les employé-e-s et ouvriers, 39h pour les journalistes de production et les cadres.
Pour les journalistes de production et les cadres, l’horaire hebdomadaire passe de 35 à 39 heures, les RTT passent de 18 jours à 7 jours par an. La pause repas de 30 minutes par jour n’est plus considérée comme du travail effectif, il faut donc rester d’autant plus tard le soir.
Pour les journalistes des desks, la direction veut arriver à 35 heures effectives, avec une présence de 7h30 par jour minimum (7h de travail et 30 minutes de pause qui ne sont plus considérées comme du travail effectif, à prendre impérativement, au plus tard après 6h de travail). Les RTT passent de 18 jours à 4 jours par an. Toutefois, « si la durée hebdomadaire du travail effectuée compte tenu de l’organisation du travail sur un desk est de 39 heures », les RTT sont portés à 7 jours par an.
Les employé-e-s et les ouvriers verraient leurs horaires hebdomadaires passer de 35 à 37 heures, les RTT passent de 14 jours à 4 jours par an. La pause repas de 30 minutes n’est plus considérée comme du travail effectif.
Le forfait jours, c’est pratique !
Lorsque le PDG a lancé l’idée du Grand accord, en 2013, certains ont cru comprendre que les sacrifices demandés aux non-journalistes et aux journalistes des desks allaient permettre un « rééquilibrage » en faveur des journalistes de production et des cadres, dont les horaires effectifs dépassent très largement les 35h inscrits sur leur bulletin de paie. Ils en sont pour leurs frais !
Les précisions fournies par la direction montrent que tous les salariés de l’agence vont subir une nouvelle dégradation de leurs conditions de travail, y compris celles et ceux qui ont déjà des horaires à rallonge : non seulement, ces derniers ne garderaient que 7 RTT sur les 18 dont ils bénéficient actuellement ; mais le projet de forfait jours les rendrait encore davantage taillables et corvéables à merci. Et ceci sans réelle contrepartie.
Au lieu de payer des heures sup’, le forfait jours serait « proposé » à certains cadres et journalistes. La direction reconnaît que ce mécanisme sera imposé aux nouveaux embauchés. De plus, lors d’un affichage de poste, elle pourra préciser qu’il s’agit d’un poste sous forfait jours. Les salariés seront libres de décliner cette « proposition », et de rester sur la touche…
Que promet la direction aux « bénéficiaires » du forfait jours ?
- Le temps de travail hebdomadaire sera extensible (la loi fixe un maximum de 48h/semaine, mais autorise des dérogations).
- Ils auront 11 jours fériés garantis par an.
- Ils bénéficieront du même nombre de jours de vacances et de congé d’ancienneté que les autres salariés.
- Au lieu de bénéficier des 7 jours de RTT accordés aux autres cadres et journalistes de production, ils auront à la place 10 jours de repos par an au titre du forfait jours…
Y aura-t-il une compensation financière ? Eh bien non, car : « il n’y a pas d’ sous ! »
Autre point, qui n’a pas encore été abordé dans la négociation : les salariés en forfait jours auront un entretien annuel qui s’apparente à un véritable entretien d’évaluation, incluant leur rémunération. On sort de plus en plus des automatismes des plans de carrière, pour renforcer la gestion « à la tête du client ».
Enfin, à noter que les notions de « qualité de vie au travail » et de « conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle » reviennent tellement souvent dans le texte de la direction que cela devient grotesque, à l’heure de la diminution des RTT et des congés (pour certains) !
Un tournant dans la négociation ?
Fait nouveau depuis la réunion du 6 octobre : des contre-propositions syndicales, intégrant le « travailler plus » (sans doute pour tenter de limiter la casse), sont désormais portées par la quasi-totalité des syndicats de l’agence. SUD a toujours refusé de rentrer dans une telle logique de renoncement qui accepte un recul social majeur : la remise en cause des 35 heures (assorties du principe de la journée continue), conquête des années 1980 pour les personnels administratifs et techniques, et des années 2000 pour les journalistes.
Ce tournant intervient alors que la direction n’a toujours pas fourni le chiffrage actualisé des économies qu’elle espère réaliser en concluant le Grand accord.
Le scénario d’avril 2014 chiffrait à 1,319 M€ l’économie annuelle obtenue dans l’hypothèse où tous les salariés statut siège passeraient à 36 jours ouvrables de congés payés, et à 0,364 M€ avec la suppression des RTT pour les desks, les employé-e-s et les ouvriers.
Si ce chiffrage - somme toute assez faible - est confirmé, peut-on sérieusement justifier la dégradation des conditions de travail et de la santé des salarié-e-s que ces mesures vont forcément entraîner ?
Nous devons tous ensemble nous opposer à cette perspective démotivante, contre-productive et dangereuse du « travailler plus ».
➢ SUD dit NON à la dégradation constante des conditions de travail.
➢ Les salariés ne sont pas responsables des difficultés financières de l’AFP. Les sacrifices demandés ne permettront pas une sortie du tunnel.
SUD invite à une réunion-débat, ouverte à tous, le mardi 18 octobre à 13h00
(Salle syndicale, 1er étage du siège, en face du CE).
Paris, le 10 octobre 2016
SUD-AFP (Solidaires-Unitaires-Démocratiques)